« Pour votre santé, mangez au moins cinq fruits et légumes par jour. » Entre ce que l’Organisation mondiale de la santé (OMS) recommande depuis plus de trente ans et la situation économique actuelle, il y a un fossé que bon nombre de foyers français ne parviennent plus à franchir. Résultat, leurs Caddies priorisent la quantité au détriment de la qualité, et tout le monde en paie les frais. « La généralisation d’une alimentation trop riche, transformée et de qualité nutritionnelle inférieure engendre une crise de santé publique », s’est alarmée Marie-Pierre de Bailliencourt par voie de presse. En tant que directrice générale de l’Institut Montaigne, cette tête pensante sait de quoi elle parle ! Après avoir examiné à la loupe la carte sociétale des modes de consommation alimentaire du pays, le groupe de réflexion qu’elle dirige a conclu dans un rapport, publié le 16 octobre, qu’en 2023, plus de 1 Français sur 3 (37 %) n’arrive pas à se nourrir correctement tous les jours. Une proportion qui grimpe à 41 % chez les 18-24 ans dans la mesure où la « malbouffe » touche particulièrement les jeunes générations. Selon le groupe d’experts, ces « phénomènes sont intimement liés à des disparités économiques et à des problématiques de santé publique qui ne cessent de s’aggraver, mettant en lumière une situation alarmante qui combine des défis sociaux, sanitaires et écologiques ».
« Maux communs, remède collectif »
Pour parer à l’urgence de la situation, l’Institut Montaigne est force de propositions : négocier un accord collectif avec les industriels en exigeant une réduction dégressive du taux de sucre dans leurs confiseries, biscuits sucrés et chocolats, céréales de petit déjeuner, pâtes à tartiner, viennoiseries et pâtisseries. Cette réglementation serait assortie d’une taxe à 20 %, sanctionnant les produits qui ne respectent pas les objectifs fixés. Grâce à cette recette fiscale pouvant générer 560 millions d’euros par an, les experts suggèrent de financer un « chèque fruits et légumes » de 30 € par mois pour quatre millions de Français en situation de fracture alimentaire. Pour conclure, ils préconisent également de renforcer la taxe existant déjà sur les boissons sucrées et édulcorées. Au-delà du champ fiscal, l’Institut Montaigne recommande aussi d’interdire les publicités pour les boissons sucrées et édulcorées en dehors du créneau 21 h-5 h pour limiter l’exposition des plus jeunes.
Qu’en disent les députés ?
En France, une taxe sur les boissons sucrées est en vigueur depuis le 1er janvier 2012, avec pour objectif de réduire leur consommation en augmentant leur prix. Dans le cadre du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) débattu cette semaine à l’Assemblée, plus de 1 500 amendements ont été déposés par les députés, dont certains visent à alourdir cette taxe en fonction de la teneur en sucre des boissons. Parallèlement, une taxe sur la publicité pour ces produits a également été suggérée : plus une boisson est sucrée, plus la taxe serait élevée.
* « Fracture alimentaire. Maux communs, remède collectif », sur institutmontaigne.org
Alertes chiffrées
Les aliments ultratransformés représentent environ 30 % de l’apport énergétique des Français, avec des niveaux allant jusqu’à 40 % en Allemagne et 50 % aux États-Unis. 87 % des enfants et 47 % des adultes consommeraient davantage de sucre que les recommandations de l’OMS. A savoir, au maximum 25 g par jour et par adulte. Pour info, un enfant de 8 ans a déjà consommé autant de sucre que son grand-père dans toute sa vie. 1 enfant sur 5 arrive le ventre vide à l’école. Seuls 20,2 % de nos plus petits consomment 5 fruits et légumes par jour.