Les femmes y ont peut-être eu recours trop facilement avant les années 2000. Mais une étude américaine en particulier, où étaient signalés à la fois des risques vasculaires et de survenue d’un cancer, a jeté un froid durable sur les prescriptions du traitement hormonal de la ménopause (THM). Mais les modalités de cette étude (en raison de la nature des hormones, notamment) ont depuis été remises en cause par nombre d’experts. Les troubles que les médecins regroupent sous le terme de « syndrome climatérique », et qui résultent de la moindre sécrétion des œstrogènes à la ménopause, justifient-ils de prendre un risque ? Et d’ailleurs, de quel risque parle-t-on ?
L’intensité de ce syndrome est éminemment variable d’une femme à l’autre, le corps réagissant diversement à ces transformations hormonales. Les plus gênants et les plus fréquents sont les bouffées de chaleur, plutôt nocturnes, signalées par 4 femmes sur 5 ; elles sont jugées insupportables par 20 % d’entre elles… Le sommeil peut être perturbé en raison des fluctuations hormonales et
des réveils liés aux sueurs. De même, l’os peut perdre en densité, en qualité, notamment en cas de tabagisme et/ou de maigreur, ce qui en compromet la solidité et facilite la survenue de fractures de “fragilité”, ostéoporotiques. Certaines femmes encore souffrent de douleurs articulaires diffuses, d’une sécheresse vaginale, sont plus irritables, etc.
Quel traitement, aujourd’hui ?
Il n’a guère changé en France où l’on associe un œstrogène par voie percutanée (un gel) ou transdermique (un patch) et de la progestérone naturelle, ce qui assure une imprégnation hormonale à l’image de ce que vivent les femmes, “naturellement”, avant leur ménopause (à des concentrations bien plus faibles). À noter que si l’utérus a été enlevé, le THM repose sur les œstrogènes uniquement. « La voie cutanée a certainement des avantages sur le plan vasculaire, et en particulier sur le risque d’accident vasculaire cérébral, lequel est moindre par rapport à des œstrogènes pris par voie orale », note le Pr Geneviève Plu-Bureau, gynécologue médicale à l’hôpital Cochin, à Paris. Cette voie permet par ailleurs de ne pas courir de risque de thrombose veineuse (phlébite, embolie pulmonaire). La neutralité des œstrogènes par voie percutanée ou transdermique et le risque toujours supérieur avec les œstrogènes oraux sont confirmés par toutes les études. « Quant aux effets indésirables de la progestérone naturelle (somnolence, vertiges), ils sont probablement moins importants qu’avec un progestatif “synthétique” », rassure la spécialiste.
Certes, comme tous les autres THM, le français augmente légèrement le risque de cancer du sein mais à condition d’avoir été utilisé sur une longue période, c’est-à-dire pendant plus de cinq-dix ans.
« Un surrisque qui fait très peur, alors que le risque vasculaire est à l’évidence bien plus important à partir de 60 ans », observe le Pr Geneviève Plu-Bureau. C’est pourquoi le traitement hormonal, s’il est justifié, n’est envisageable que dans les toutes premières années de la ménopause, et avant 60 ans, sous peine de prendre un risque vasculaire (les hormones facilitant le décollement de plaques d’athérome et ainsi les accidents coronariens ou cérébraux). Et ce, pour une durée la plus courte possible. Son intérêt, la balance bénéfices/risques, doit être régulièrement réévalué, une fois par an au moins. Une consultation qui est d’ailleurs l’occasion de “faire une révision” des appareils et fonctions “sensibles” et vieillissants (voir encadré).
Pour qui ce THM ?
Pour « les femmes présentant des symptômes en rapport avec la ménopause, c’est-à-dire un syndrome climatérique caractérisé par des bouffées de chaleur invalidantes », indique la gynécologue.
Il est alors d’autant plus nécessaire si la densité minérale osseuse, un indice d’ostéoporose et de fracture conséquente, est préoccupante. Les nombreux autres troubles enregistrés à cette période, comme des douleurs diffuses ou une insomnie, n’emportent pas isolément la décision de prescrire le THM. Au-delà du bénéfice apporté (en quelques jours) sur ces perturbations aiguës, voire insupportables pour certaines, ce traitement est aussi le seul qui soit “physiologique” et préventif de la perte osseuse postménopausique, quand le risque de fracture de ce type est élevé avant 60 ans. Il semble aussi que, instauré assez tôt après la ménopause et avant 60 ans, le risque de maladie coronarienne et de décès soit abaissé. En revanche, si facteurs de risque vasculaire, surpoids, excès de lipides sanguins, hypertension et/ou antécédents familiaux de maladie artérielle il y a, la décision d’un THM est alors mesurée et fonction du bilan vasculaire.
Le THM est absolument contre-indiqué en cas d’infarctus du myocarde ou d’AVC ischémique (reflet de la présence d’athérome dans les artères cérébrales) et de cancer hormonodépendant (endomètre, sein). Enfin, d’autres options non hormonales comme la phytothérapie, l’hypnose, l’acupuncture et l’homéopathie atténuent certains symptômes climatériques
Quid des risques métaboliques à la ménopause ?
Les maladies cardiovasculaires sont aujourd’hui la première cause de mortalité chez les femmes en Europe, à l’origine de six fois plus de décès que les cancers du sein. Les femmes présentent désormais plus de facteurs de risque (cholestérol, hypertension, diabète, etc.) que les hommes à âge égal, plus de 80 % présentant au moins deux de ces facteurs après 45 ans… Le déficit progressif
en œstrogènes se traduit par une prise de poids, plutôt au niveau abdominal, ce qui favorise la survenue d’un diabète et une augmentation du “mauvais” cholestérol, préludes à un remaniement des artères, plus rigides et plus exposées à un accident vasculaire, coronarien et cérébral. La balance bénéfices/risques d’un THM est donc fondée, à cette période, sur une évaluation double et parallèle, soit gynécologique et cardiovasculaire.
Chiffre
L’âge moyen de la ménopause, définie par un arrêt des règles depuis un an, est de 51 ans en France.