Aujourd’hui, on en sait beaucoup plus sur les déterminants de la migraine, ce qui a facilité la mise au point de nouveaux médicaments. Le cerveau lui-même ne possède pas de récepteurs de la douleur ; ce sont ses enveloppes, les méninges, qui souffrent, et en particulier la plus externe, la dure-mère, très vascularisée, où se projettent les axones (prolongements des neurones) du nerf trijumeau qui appartient au système nerveux périphérique (parties du système nerveux se trouvent à l’extérieur du cerveau et de la moelle épinière).
Maladie neurologique
Ce nerf situé à la base du crâne qui gouverne la sensibilité de la face (maxillaires supérieur et inférieur, yeux) comporte des fibres dont une partie libère un neuropeptide, le CGRP (Calcitonin Gene-Related Peptide) – qui favorise la dilatation des vaisseaux et l’inflammation –, cible des nouveaux médicaments. La migraine est une maladie neurologique, donc, neurogénétique, plus précisément, et féminine, surtout (2 à 3 femmes pour 1 homme sont concernées).
Par ailleurs, des terminaisons nerveuses issues des centres de commande du système nerveux végétatif – situés eux aussi dans le tronc cérébral, à la base du crâne – s’enroulent autour des artères cérébrales.
Migraine ou AVC ?
Un migraineux n’a pas plus de risque qu’un autre de faire un accident vasculaire cérébral (AVC). Pas plus, mais pas moins non plus… Ainsi, une céphalée différente, forte et durable, et qui survient à un certain âge (où les facteurs de risque vasculaire s’accumulent) doit alerter et inciter à consulter.
Envahissante
Lors des crises, un hyperfonctionnement neuronal très bref se produit, suivi d’une dépression des centres qui règlent le calibre des artères dans le tronc cérébral, puis d’un tsunami neurophysiologique (une dépression de l’activité neuronale, phénomène lent) qui s’étend du tronc cérébral vers le cortex occipital (centre de la vision) où la dépression de l’activité des neurones s’accompagne d’une réduction du débit des artères et, donc, d’une baisse du débit sanguin. Une phase souvent silencieuse mais au cours de laquelle peuvent aussi survenir les « auras » visuelles (zigzags lumineux, amputation du champ visuel, etc.), qui entament la « marche » migraineuse.
Dans un second temps, cette dépression neuronale envahissante réveille les récepteurs de la douleur du nerf trijumeau et les artères se dilatent anormalement. Des protéines de l’inflammation, dont le CGRP, sont alors larguées sur le pourtour des artères méningées.
Sur ce « terrain » favorable, des facteurs environnementaux, comme une grasse matinée, le vent, etc., suffisent à déclencher une crise.
Migraine épisodique
La prise en charge d’une migraine épisodique (moins de 15 jours par mois) vise le soulagement des douleurs et des symptômes associés, avec, selon l’intensité de la crise, l’aspirine (seule ou combinée à un médicament contre les nausées et les vomissements), le paracétamol, un anti-inflammatoire non stéroïdien (diclofénac, ibuprofène, kétoprofène) ou l’un des sept triptans. Des traitements à utiliser dès le début de la crise, à dose efficace d’emblée. Leur prise ne doit toutefois pas excéder 8 jours par mois.
Sur un mode chronique
Lorsque la maladie migraineuse le justifie, un traitement préventif doit être proposé. Mais l’efficacité des médicaments (bêtabloquant pour les migraines épisodiques surtout ; antidépresseur ou antiépileptique pour les migraines chroniques) est modeste ou leur tolérance peu acceptable (en cas de grossesse pour le topiramate et le valproate, par exemple).
La toxine botulique, qui a obtenu une autorisation de mise sur le marché en 2021, est fortement recommandée pour les migraines chroniques après échec des traitements oraux. Enfin, les anticorps monoclonaux anti-CGRP sont efficaces à la fois sur les migraines épisodiques (de plus de 8 jours par mois) et chroniques, même en cas de surconsommation médicamenteuse ; ils permettent de réduire le nombre de jours de crise et ce, sans sevrage préalable. En outre, l’activité physique en plein air, les plantes, la mélatonine, la coenzyme Q10 ou encore l’acupuncture peuvent être des alternatives ou des compléments utiles.
Nouveaux traitements
Trois gépants sont aujourd’hui disponibles, dont un en réserve hospitalière (dans certains centres) et les deux autres en ville : le rimégépant pour la crise et le fond, et l’atogépant en prévention après essai d’au moins deux traitements préventifs. Ces traitements sont soumis à prescription médicale par un neurologue uniquement, et ne sont pas remboursés (environ 250 € par mois).
Esquive
Stress ou levée de stress, excès ou déficit de sommeil, règles (les migraines dites « cataméniales » surviennent deux jours avant et se poursuivent jusqu’au troisième jour des règles), météo, etc., les facteurs déclenchants d’une crise, en dehors des aléas alimentaires, sont nombreux. Ils brouillent la chimie du cerveau par des canaux qui peuvent être différents. On peut atténuer les fluctuations hormonales, et plus précisément le différentiel œstrogénique au moment de la « fenêtre » entre deux plaquettes de pilule ou deux cycles naturels, en prenant des œstrogènes en gel ou en patch, ou des anti-inflammatoires oraux lors des sept jours d’interruption de la contraception, ou deux à trois jours avant l’apparition supposée de la crise. L’objectif étant de la devancer.
C’est bien une migraine si…
Une migraine, le plus souvent sans aura, évolue par crises de 4 à 72 heures sans traitement. De plus, la céphalée présente au moins deux des quatre caractéristiques suivantes : unilatérale, pulsatile, aggravée à l’effort, modérée à sévère (qui empêche de faire quoi que ce soit). Et s’accompagne de l’un de ces deux signes : phono- et photophobie et/ou nausées (et/ou vomissements). Enfin, la notion de cinq épisodes préalables identiques est indispensable pour poser le diagnostic. L’examen neurologique est sans anomalie entre les crises.
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Association La Voix des Migraineux : lavoixdesmigraineux.fr