Avec les changements climatiques, l’aire d’activité des moustiques s’étend, augmentant les cas de dirofilariose. Cette pathologie vectorielle affecte essentiellement les animaux carnivores, domestiques ou sauvages : chiens, chats, furets, renards, loups, etc.
Un mal qui se propage
Jusqu’ici, la dirofilariose était cantonnée aux pays tropicaux, à climat chaud. En Europe, elle sévissait surtout dans le bassin méditerranéen (Espagne, Italie, Portugal, Grèce, Corse, Sardaigne). Mais elle a gagné du terrain, et la France est désormais également concernée. Des cas ont même été recensés en Finlande, chez des chiens n’ayant jamais voyagé.
En France
La maladie est très fréquente en Guadeloupe, en Martinique, en Guyane et à la Réunion. En France métropolitaine, si elle était jusque-là surtout présente dans le Sud, elle progresse désormais vers le Nord. Mais l’importance du parasite reste encore très sous-estimée dans de nombreuses régions.
Dans le reste de l’Europe
Dans certains refuges du sud de l’Italie, plus de 40 % des chiens ont été détectés positifs à la dirofilariose. Dans les pays où les vétérinaires ont pris la mesure du problème, la prévalence (nombre de cas) se stabilise, mais là où la maladie est apparue récemment, comme en Europe centrale et en Europe du Nord, la progression est rapide. En Turquie et en Hongrie, des enquêtes ont montré que plus de 20 % des chiens étaient infestés par des filaires parasites.
Un parasite responsable de nombreux troubles
La dirofilariose cardiopulmonaire est due à la présence et au développement d’un ver rond (Dirofilaria immitis) dans les artères pulmonaires et le ventricule droit du cœur du chien.
Plusieurs années peuvent s’écouler après la contamination avant que les premiers signes de la maladie ne se manifestent. Les symptômes sont des troubles respiratoires et cardiaques : toux, difficultés à respirer plus ou moins marquées, œdème de l’abdomen, affaiblissement du chien qui peut faire des syncopes à l’exercice… Les vers adultes se logent aussi parfois dans des endroits atypiques, notamment dans l’œil, le système nerveux central ou encore le tissu musculaire. Des lésions rénales sont également fréquentes.
Le chien peut même décéder soudainement du fait de la formation d’un caillot qui obstrue une artère ou une veine vitale.
Un diagnostic délicat chez le chien
Le diagnostic d’une dirofilariose cardiopulmonaire implique en général la réalisation de plusieurs examens successifs. Si le vétérinaire suspecte la présence de ce parasite chez un chien, il peut commencer par faire un test antigénique : des tests rapides permettent en effet de détecter une protéine sécrétée par les vers femelles de D. immitis. Si ces tests présentent une bonne sensibilité, des faux négatifs sont en revanche fréquents.
La probabilité de repérer des filaires dans un prélèvement de sang n’excède pas 20-30 %. Une échographie peut permettre de visualiser des parasites dans le cœur ou les gros vaisseaux. Des radiographies thoraciques montrent souvent une augmentation de la taille du cœur et des anomalies au niveau des vaisseaux pulmonaires.
La maladie des vers du cœur chez le chat
Le risque de dirofilariose cardiopulmonaire existe également chez le chat, mais sa fréquence est dix fois moins importante que chez le chien. Les parasites adultes présents dans l’appareil circulatoire du chat sont peu nombreux et beaucoup d’animaux ne présentent pas ou peu de symptômes. Les parasites ne survivent pas plus de deux ans et la guérison peut être spontanée. Dans les zones à risque, un traitement préventif est toutefois conseillé.
Un traitement non dénué de risques
Lorsqu’un chien est contaminé par des moustiques porteurs du parasite, une phase de développement des larves, les microfilaires, précède la colonisation du cœur par les vers adultes, les filaires. Celle-ci dure en général cinq à huit mois.
Éliminer les larves
Si le chien a séjourné longtemps dans un pays où la maladie sévit beaucoup sans avoir reçu de traitement préventif, il est possible d’intervenir avant que les larves n’atteignent le stade adulte. Dans ce cas, plusieurs médicaments existent (ivermectine, milbémycine, moxidectine, etc.) par voie orale ou en injection.
Tuer les parasites adultes
Lorsque la colonisation du cœur par les vers adultes est avérée, le traitement médical s’étale en général sur plusieurs mois et est basé sur l’utilisation séquentielle de différents produits. La moxidectine semble cependant être la molécule la plus puissante et la plus sûre ; on y a recours pour venir à bout des parasites résistants à d’autres médicaments : des parasites résistants, qui ont commencé à être observés en Amérique du Nord, sont susceptibles d’apparaître en Europe.
Effets secondaires
Le traitement d’une dirofilariose n’est jamais exempt de risques pour le chien. Des vomissements, des diarrhées ou des troubles neurologiques peuvent apparaître dans les 24-48 heures qui suivent l’administration du traitement. Des embolies vasculaires sont possibles si les filaires tuées par le médicament passent dans la circulation générale.
Dans certains cas d’infestation très grave ou de localisation aberrante des parasites, lorsqu’ils compriment la moelle épinière par exemple, une chirurgie peut être nécessaire.
Mieux vaut prévenir…
Les changements climatiques et les déplacements de plus en plus nombreux des chiens favorisent l’extension des maladies vectorielles, dont la dirofilariose cardiopulmonaire. La prévention est donc très importante, d’autant que la maladie peut toucher l’homme.
Dans les régions à risque, limiter le risque de transmission au chien exige d’abord d’utiliser des antiparasitaires externes (pipettes, comprimés, collier) qui vont éloigner les moustiques et empêcher les piqûres. Le genre de moustiques prédominant en France métropolitaine (Culex) peut diffuser la maladie mais d’autres espèces, dont le moustique-tigre, sont également susceptibles de servir de vecteurs à la maladie des vers du cœur.
L’administration régulière d’un médicament capable d’éliminer les larves de filaires complétera la protection. Si l’animal vit en permanence dans une zone à risque, il est conseillé de le traiter une fois par mois durant toute la période d’activité des moustiques. Un chien exposé ponctuellement au risque de contamination sera traité tous les mois pendant son séjour, puis une fois au retour.
La dirofilariose cutanée
Une autre dirofilariose canine existe en France : la dirofilariose cutanée, due à Dirofilaria repens. Ce parasite provoque surtout des tuméfactions, sources de démangeaisons, ainsi que des nodules sous-cutanés pouvant évoquer des tumeurs. Les conséquences sont donc moins graves pour le chien mais des lésions rénales sont également fréquentes. Aujourd’hui, la prévalence cette dirofilariose dépasse celle cardiopulmonaire dans de nombreux pays européens. C’est aussi la première cause de filariose chez l’homme, en Europe.